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Ca s'danse la tête contre les murs

20 avril 2012

( à rebosser ) La peinture du Factotum.C'est à

( à rebosser )

La peinture du Factotum.


C'est à dire que je suis tombé amoureux un lundi.
Au coucher du soleil, donc aux alentours de 8 heures, un truc comme ça.
Billy et moi, on se baladait dans la rue Feldman, non loin de l'Union Station. C'était la première fois que je visitais Chicago. Que je visitais vraiment, je veux dire, sur terre.
Je suis arrivé il y'a trois mois, ma valise toujours pleine, j'étais occupé à marcher pieds nus sur le parquet de mon appartement, à faire les cents pas, sur ce sol qui grince et qui m'énerve. Ou alors je passais mon temps à éteindre cigarette par cigarette, le petit souffle de curiosité qui grondait encore en moi à mon arrivée. Ma curiosité a disparue quand j'ai trouvé un repère dans les égouts, vous savez, un énorme repère. J'en parle pas à grand monde, d'ailleurs je parle pas à grand monde tout court, mais je vous le dit, une cachette digne du plus grand pirate, avec des bouquins, et un tas de cd. Des choses qu'on ne trouve plus de nos jours. Des souvenirs, et des sentiments, essentiellement. Des trucs qui ont étés censurés quoi. Et un peu de réflexion. Oui, de la réflexion, y'en a plus vraiment au dessus, sur terre. Ou alors ils réfléchissent sur les mauvaises choses.
Y'a pas grand monde dans les égouts, la journée. Les gens viennent surtout la nuit, comme si ça changeait quelque chose, c'est bête, car dans tous les cas, on y voit rien. C'est plus excitant peut-être. 'Parait que c'est l'endroit à la mode pour les fraichement-diplomés-sans-boulot. Parait aussi que c'est l'endroit à la mode pour se faire couper la gorge. Ça veut donc dire que les flics ne viennent pas, et que par conséquent, moi je suis dans les parages.
De temps à autre, je vois des gens avec des bottes et des barres en fer, d'autres fois ils ont un cône fumant à la main, et puis un coup sur trois, c'est un couple qui vient .. Ca fait passer le temps, meme si je n'vois pas bien l'intérêt de faire son business-amoureux dans un endroit aussi glauque. Mais après tout, c'est le truc de certains, vous savez... D'être vus à travers le trou d'un mur bétonné, entouré de rats et de leur toxoplasmose, les pieds dans l'eau stagnante. Et pour paysage, des statues peintes avec d'étranges substances, par les plus gros pervers de tout Chicago. Même mes magazines un peu osés, je ne les emmène pas ici, de peur d'y repenser ensuite.

Pour tout dire, si je reste sous terre dans mon petit paradis, c'est que je n'aime pas trop le sourire des gens dans cette ville, pour la simple raison qu'il n'existe pas. Ensuite, je n'aime pas trop les gens de cette ville, ce n'est pas qu'ils n'existent pas, c'est juste qu'ils ne sont pas vraiment humains. Cette petite escapade, dans la rue Feldman, me l'a confirmé, et j'en ai encore la nausée, moi, le mec qui passe ses journées dans les égouts. Qui aurait pensé...


Le soleil se cachait peu à peu, et avec Billy, on s'est tellement enfoncés dans ce Chicago peu fréquentable, que tous ces murs bleus, cette atmosphère glaciale, m'aurait fait presque peur. Pourtant je suis fan de tous ces vieux kino, sur tous ces gangs dans les villes américaines. Si vous aimez un peu, vous voyez vite le topo dans lequel j'étais, avec Christopher Walken en moins, et le prix du verre de scotch en double. Je n'avais plus assez pour m'acheter un cigare, juste pour faire genre. Alors j'ai froncé mes sourcils, histoire d'avoir l'air d'un gangster moi aussi, parceque ca coute moins cher qu'un flingue, et que ca fait un peu peur quand même.
En trouvant les bons raccourcis pour se perdre de tous ces buildings dégueulasses qui puent le fric et le travail à la chaine, on a atterris dans une galerie d'art du nom de "Factotum"
Avec un nom pareil, je m'suis dit qu'il fallait pas que j'y rentre. Et puis, comme je fais souvent le contraire de ce que je dis, j'y ai mis un pied. Puis l'autre. Bon, d'abord le gauche, et ensuite le droit. Question d'habitude, pour que tout se passe bien, vu le fichu pressentiment qui m'habitait.
Bien sur, à l'entrée, on m'a dit que je ne devais pas prendre de nourriture, pas d'appareil photo.
Je trouvais cependant bizarre qu'on me demande de retirer mes chaussures, et qu'on m'interdise de faire le moindre bruit.
Bref, Je me suis retrouvé, là, au milieu de toutes ces oeuvres, j'avais toujours mon sourcil de travers, et ma dent en or faisait de l'œil aux plus encostardé de la pièce. Ils me zieutaient, et retournaient à leur occupation, les yeux pendus aux couleurs des tableaux. J'ai décidé de regarder aussi. Et là, j'ai été scotché, littéralement, au premier regard jeté dans la pièce, sur la peinture aux couleurs chaudes à droite. Je suis tombé amoureux de cette toile, directement. C'était une femme peinte dessus, elle devait avoir la vingtaine, très belle, la lumière donnée par le peintre laissait une impression de douceur intense. Elle était brune, avec un nez sublime. Ses ongles étaient impeccablement dessinés, jusqu'à ses empreintes digitales. Quelle précision.
C'était magnifique, et répugnant à la fois. Si réaliste. Je ressentais du désir, juste en effleurant du regard cette toile. Si j'avais su que ce genre de chose existait, j'aurais trainé plus que ça dans les galeries au lieu de errer dans le musée des horreurs que sont les égouts.


J'ai abandonné peu à peu mon repère en sous-sol pour l'aile ouest de la galerie Factotum. J'y passais plusieurs fois par semaine. Puis, plusieurs fois par jour. Je crois que je suis décidément tombé amoureux de cette toile. Il fallait que je l'achète, que je la vole, qu'importe le moyen, je devais l'avoir entre mes mains. Mais le prix était bien plus élevé que toutes les autres toiles et la surveillance aussi. Il se passait quelque chose entre elle et moi. Ce regard vert voulait dire plus que ça, ils n'était pas vide. Il y'avait une sorte de souffle, à l'intérieur. De chaleur. J'avais l'impression qu'une fois mes yeux dans les siens, il y'avait une réponse. Une réponse à je ne sais pas quoi, mais je mourrais d'envie de comprendre. J'étais envouté. Complétement. J'aurais pu m'évanouir comme pris du syndrome de Stendhal, seulement j'avais trop peur qu'elle disparaisse durant mes quelques minutes d'inconscience.

Je rêvassais donc bêtement depuis quelques heures, mon crane était remplit de divers plans pour m'emparer de ce trésor. Tous plus tordus et impossibles à réaliser les uns que les autres. Me faire passer pour une personne très riche, m'introduire la nuit dans la galerie, voler l'uniforme du gardien, menacer le peintre, imprimer des faux billets, détourner un avion pour faire diversion. Et j'en passe. C'est alors que j'ai entendu quelqu'un parler, rompre le silence de la galerie. Je n'avais pas entendu un seul mot depuis ma première visite.
Cette personne a fait résonner dans le vide, un "Frida, c'est bon, tu peux rentrer chez toi, on ferme plus tôt aujourd'hui".
La toile s'est mise à bouger, la femme s'en est détachée.
Là, comme ça, le sujet s'est arraché de son décor, a mis un peignoir, et s'est en allé en direction des toilettes.
Vous imaginez la claque que j'ai reçue.
La "femme aux doigts de feu" comme il était indiqué sur la plaque en or à coté, était réelle. Elle existait, et elle était là, dans les toilettes à coté de moi. Là ou j'étais allé me soulager un peu plus tot. Ce tableau que j'ai regardé des heures et des heures durant, c'était une femme, une vraie femme, une belle femme, en chair, en os, avec un vrai souffle, un vrai sourire, des vraies courbes, de vrais cheveux à toucher. Elle s'appelait Frida, et chaque jours de 10h30 à 23 heures, elle ne bouge pas d'un cil. Elle reste là, dans l'encadrement en bois de sa toile.

Frida était une œuvre d'art, m'a soufflé un visiteur. C'était son boulot, qu'il a dit. Il avait l'air étonné que je ne le sache pas. Elle était peinte par Max Bridal, originaire de Chicago justement. Il utilisait une peinture qu'il avait créé lui même, indélébile. Ce n'est pas vraiment du tatouage, c'est comme posé sur la peau apparemment, et ça ne part jamais. Il a passé des années entières à trouver la formule parfaite. Et maintenant, il exerçait cette pratique sans scrupules.
Les femmes comme Frida, il y'en avait plusieurs, mais Frida était la seule exposée au factotum. Elle devait chaque matin, manger beaucoup, surtout des pilules, Agatax, Lupidal, Taélius, Ergidé, Opéga-Hantébuc, dans les grandes lignes. C'était des pilules créées avec l'intention de faire diminuer la vitesse du coeur, afin de limiter chaque mouvement et d'offrir une expression figée à celui qui les ingérait. Elles durcissaient la peau, et l'empêchait de bronzer, permettant ainsi au consommateur de rester physiquement intact. Un certain temps du moins.
Aussi, avant de commencer sa journée, Frida ne devait pas boire. Car si elle buvait trop, ses besoins naturels allaient ressurgir, hors il était interdit pour elle de quitter sa place au centre du tableau. C'était son boulot, de rester là devant un public, avec sa peinture sur son corps. Ne pas cligner des yeux, limiter au maximum sa respiration, être insensible à tout. Faire abstraction du monde qui l'entoure, un peu comme moi dans les égouts.
Il y'avait des collectionneurs, m'a dit le visiteur, qui désiraient avoir chaque tableau. Et ces femmes-œuvres d'arts, une fois achetées, devaient rester dans le salon de leur propriétaire à des horaires bien précises, le plus souvent nue, car la peinture adhère mieux, et ce qu'importe la saison et la température. Elles devaient être imperturbables et parfaites. Leur alimentation, quand elle n'était pas constituée de pillules, était très équilibrée, car l'interdiction de grossir et d'ainsi prendre le risque de modifier la peinture sur leurs corps était de mise.

J'étais scandalisé par ce que je venais d'apprendre, c'était terrifiant. Et pourtant j'étais heureux, j'allais pouvoir lui parler. Ni une ni deux, j'ai filmé un jeune couple dans les égouts, en train de s'amuser. Et je les ai fait chanter. J'ai proposé mon silence et la suppression de la vidéo en échange de la bague de fiançailles de la p'tite demoiselle.
J'allais demander Frida en mariage. Elle savait qui j'étais, puisqu'elle me voyait tous les jours. Je pourrais la délivrer de ça, de ce silence. On pourra parler, on pourra se toucher, et s'aimer. Oui. J'allais la demander en mariage, cette femme, que je désirais tant, que j'aimais. Je voulais passer ma vie dans ses cheveux couleur chocolats, enlacé par ses mains de feu. J'ai donc trouvé un costume pas trop sale dans les poubelles de l'Union Station, j'ai mis un coup de peigne dans mes cheveux, et j'ai fait briller ma dent. Histoire d'avoir l'air aussi étincelant que ma convoitée.

Le jour où j'allais faire ma demande, le gardien m'a annoncé que Frida avait sauté d'un pont, nue. Le pont de la rue Feldman, en face de la galerie, a 23h12. C'était à la fin de son service. Le rouge de sa peau s'est mélangé avec le bleu de l'eau glacée. La nouvelle a résonné dans mes oreilles, et le temps que je remette les mots dans l'ordre, j'étais déjà en larmes sur l'épaule du gardien, qui n'avait pas l'air de comprendre ma peine. Lui, avait plutôt perdu un objet de sa collection, moi j'avais perdu mon cœur, il était tombé du pont et s'était brisé.

Ma tête toujours sur son épaule, il m'a dit que les femmes-œuvres d'arts avaient une espérance de vie assez courte, vu leur quotidien très strict. Et qu'elles mouraient généralement très jeunes. Souvent, elles se tailladaient le visage, et le corps, à la vue des rides qui se formaient sur leur peau. Arrivées trente ans, elles n'étaient plus aussi belles, ça devait leur faire un choc, de passer d'une beauté presque divine à de vulgaires bout de chairs colorés et animés. Les collectionneurs commençaient d'ailleurs à s'inquiéter, lorsqu'elles arrivaient à 28 ans. Leur objectif premier était une mort par over-dose d'un quelconque médicaments, généralement le Taélius. C'était leur préféré, car il n'abimait pas trop la peau. Ça restait "naturel" aux yeux des autres, plutôt discret. Mais souvent ils les empoisonnaient, c'était la coutume. Une fois mortes, ils préservaient leurs corps. Ceux-ci qui appartenaient à leurs propriétaires, qui étaient donc en droit d'en faire tous ce qu'ils voulaient, notamment les plonger dans des vitrines remplies de formol, au beau milieu d'un salon design.

Ce que j'ai appris, au détour de la rue Feldman, c'était vraiment dégueulasse. Pire que tout ce que j'avais pu voir dans les égouts... Alors, si vous croisez, au détour d'une rue, une femme magnifique à la peau recouverte d'une étrange peinture, écoutez attentivement le cri dans son regard, et s'il vous plait, sauvez-là de ma part.

 

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20 avril 2012

Tout ce cirque pour un stylo tombé au sol. J'ai


Tout ce cirque pour un stylo tombé au sol.


J'ai toujours été maladroit. Je vous jure, je l'ai toujours été. C'est pas d'ma faute.

- Ainsi, vous étiez, mardi 16 janvier 1998, sur le pont des Météorites?

- Je tombe souvent des chaises, je n'y peux rien.

- Vous ne répondez pas à ma question, Monsieur Renard. Etiez-vous, oui ou non, sur le pont des Météorites, la semaine dernière, le 16 janvier, aux alentours de 17h30 ?

- C'est pareil pour mes stylos, ils tombent sans arrêt. Tout le temps, comme ça, par magie. Boum ! Comme si, j'sais pas, quelqu'un les poussait à ma place. Bon c'est vrai. Au début, j'avais l'impression que j'étais juste maladroit.

- Vous avouez donc ?

- J'avoue quoi ? D'être né avec deux bras gauches ? 'Faut en parler à ma mère ça, monsieur, ce n'est pas moi qu'il faut embêter. Je ne suis que le résultat de cette triste expérience qu'est la grossesse. Oui. Et j'ai deux bras gauches. Et les mains qui vont avec. Mais ce n'est pas ma faute, pas ma faute...

- Cessez donc ce cirque, et répondez à ma question, vous avouez donc ?

- Que j'avoue quoi ? Être coupable d'être né, moi, Maurice Renard, aux alentours de 11 heures, à l'hôpital Serge Carnaval ? Je n'y peux rien ! Vous faites erreur dans le service après vente, Monsieur ! Regardez... Vous me dites que c'est le cirque partout où je passe...

- Oui enfin, si ce n'était qu'un cirque, vous ne seriez pas là aujourd'hui ...

- Laissez moi finir, genre, oui vous avez raison, c'est le cirque sur mon passage, tous les jours, tout le temps. Ils arrivent, là, et devinez ce qu'ils font? Ils plantent carrément les piquets, ils emmènent les tigres aux grosses dents, les danseuses toutes mignonnes dans leurs petits tutus. Il arrivent avec leur maquillage et leurs costumes, leurs paillettes et leur talc qui pue. Il pue leur talc, vraiment ! Et moi, je suis là, et je demande juste à être tranquille, je veux qu'on me laisse en paix. J'en veux plus de ce cirque, qui bourdonne dans ma tête jusqu'à 7 heures tous les matins. Ting ting ting, les marteaux qui résonnent sous le chapiteau. Vous imaginez pas tout le grabuge qu'ils font ! Non, vous, vous ne pouvez pas comprendre...

- Vous rejetez la faute sur ces gens du voyage ?

- Ce n'est pas exactement ça, je dis juste qu'ils me suivent tout le temps. Je me sens un peu traqué. Genre, je suis leur dernier numéro, je ne suis pas le clown triste, ni le clown méchant, je suis le maladroit. Celui qui fait tout tomber sur son passage. Le clou spectacle !

- On en arrive au point intéressant.. Vous pouvez développer?

- Ben j'veux dire, je suis souvent tout seul dans mon jardin, là, à arroser mon arbre à coeur avec le reste de thé de mon petit déjeuner, et je les entends, ils arrivent. Comme ça, dans mon jardin. Vous imaginez, vous, un cirque qui débarque, là, au beau milieu de votre propriété ?

- Mais comment rentrent-ils tous ?

- Vous ne pouvez pas comprendre.. Alors ca m'énerve, et je fais tomber ma tasse. Du coup, ca me brise le coeur, et je m'énerve encore plus. Et mon peignoir tombe. Et tous les matins, c'est la même chose, je casse une tasse, et me retrouve nu, face à la voisine d'en face. Surprise, elle fait tomber ses mots croisés par terre.

- Et c'est tout? Je vous soupçonne de changer de sujet, et de me prendre pour un imbécile.

- Mais non, mais non ce n'est pas tout. J'ai d'abord pensé, que j'étais maladroit ! Et puis, plus je faisais tomber des choses, stylos, livres, vêtements, clefs de maison, chapeaux, bijoux, plus je me rends compte qu'en fait...

- Qu'en fait ?

- Qu'en fait, j'aimais ça. Je voulais passer ma vie à faire tomber des choses.

- Alors vous avouez donc ?

- J'avoue quoi ? Éprouver une certaine satisfaction à voir les choses au sol ? Mais nous sommes tous des animaux Monsieur, les objets, ce n'est pas fait pour rester en hauteur..

- Ne soyez pas absurde.

- Je disais donc, que j'éprouvais une certaine satisfaction à voir les choses au sol. A les faire tomber. Quoi de plus beau que le bruit mélodieux d'une assiette qui se casse? J'en ai assez d'être gentil. J'en ai assez d'être maladroit. Je veux, être méchant. Et je me suis rendu compte, que ma voisine, n'était pas contente quand elle faisait tomber ses mots croisés édition delux.

- Vous n'avez jamais pensé à .. voir Quelqu'un ?

- Comment ça voir quelqu'un ?

- Vous savez ... Quelqu'un.

- Ah. Ma mère, était inquiète, à cause du cirque. Elle ne le voyait pas. Vous savez, le cirque dans mon jardin. Elle ne l'entendais pas. Comment peut-on ne pas le voir ? Le talc, et son odeur .. Comment ne pas le sentir ?

- Oui oui, je sais, le talc qui pue.. Continuez.

- Et bien, elle m'a dit, ensuite, que j'avais attrapé une angine, et qu'il fallait que j'aille voir le docteur Cagette. J'y suis allé.

- Et ?

- Et je n'avais pas d'angine.

- ....

- Par contre, il me parlait, parlait, parlait. Il est encore pire que moi. Et entre ses dents, j'ai entendu des syndrome .. Syndrome.. Ah, qu'est-ce qu'il disait déjà... Syndrome du manque d'attention. C'est ça. Mais expliquez moi, comment voulez vous être atteint du syndrome du manque d'attention, quand un CIRQUE ENTIER vient chez vous ? Hein ? Qu'il est jaloux, ce vilain docteur. Je lui offre mon cirque si il veut, les tutus et les paillettes qui vont avec.

- Soit .. Et que vous a-t-il dit de plus, Monsieur Renard ?

- Je n'sais plus, j'étais outrageusement vexé par ses propos. Alors il m'a regardé de derrière ses lunettes et ses lèvres ont bougées. J'ai entendu " Fais tomber mon café ".

- Alors ?

- Alors je l'ai fait tomber, que vouliez vous que je fasse d'autre ? Et c'était beau. Je me sentais bien. Alors quand je suis sorti, j'ai pris mon sac, et je l'ai lancé au sol. Et puis après, j'ai tout fait tomber par terre. Je voulais tout voir sur le goudron. Les journaux des passants, les baguettes de pain, les cigarettes de monsieur, le chapeau de madame, les étagères dans la bibliothèque, les grands-mère dans le bus. Tout. Et j'y a pris un pied monstrueux. Un pied comme je n'en avais jamais pris auparavant. Mieux que les femmes, Monsieur, je vous jure, j'avais tout le monde. Tout le monde à mes pieds.

- Quel jour êtes-vous allé consulter le docteur Cagette ?

- Lundi dernier Monsieur... Non. attendez, c'était mardi. Mais ce n'est pas bien important.. Vous n'êtes pas plutôt intéressé par la jouissance de cet acte ? Je veux dire, vous ne voulez pas ressentir la même chose ? C'était quand même sacrément bon !

- Mardi 16 ?

- Très probablement oui. Vous savez, les chiffres et moi .. Vous êtes vraiment rabat-joie.. vous ne souhaitez pas connaitre le bonheur. Vous êtes jaloux, c'est tout.

- Et vous êtes rentré par le pont de Météorites, pour revenir à votre domicile ?

- C'est à dire qu'après avoir fait tomber tant de choses, je commençais à avoir le pantalon tout sale. J'avais du café sur moi, de la terre, de la nourriture. C'est pas tout propre.. Et le pont des Météorites, c'est mon raccourci secret pour ne pas passer devant le cirque, et surtout pour arriver très rapidement chez moi.. Pourquoi cette question ?

- Monsieur Renard, vous allez devoir me répondre, clairement et distinctement. Êtes vous coupable du meurtre de Monsieur Henri Millequant ? L'avez vous, oui ou non, poussé et fait tomber du pont des Météorites, le Mardi 16 janvier à 17 heures précises?

- C'est à dire, Monsieur le juge, qu'il portait un nez de clown.

15 avril 2012

BONJOUR ! Pour tout vous avouer, je cherche

BONJOUR !

Pour tout vous avouer, je cherche quelqu'un pourrait m'aider à faire une page avec des liens. A faire une nouvelle page, jolie quoi, et pratique.

Histoire de faire une partie photo, une autre projets à coté, et une autre écriture.

 

Voila, contactez-moi ici si vous voulez/pouvez m'aider.

Merci.

 

Claude H.

 

26 mars 2012

Je viens de remarquer ces derniers jours que des

Je viens de remarquer ces derniers jours que des personnes m'avaient ajoutée dans leurs favoris, ou alors se remettaient à lire mon blog.

J'en suis vraiment contente! Je le pensais en ruines abandonnées.

C'est pourquoi, j'annonce pour-de-vrai qu'il va reprendre du service.

Bon ca ne sera pas grand chose non plus, mais je vais y faire un petit nettoyage, déjà.

(et si quelqu'un aurait l'envie de m'expliquer comment on fait des fichues catégories... j'en serais vraiment heureuse, HAHA)

 

 

4 mars 2012

BRIKSDAL Certains comptent les moutons quand ils

BRIKSDAL


Certains comptent les moutons quand ils n'arrivent pas à dormir.
Marine Dotchault, elle, compte les gouttelettes de son radiateur. Il est cassé. L'eau qui y coule donne presque envie d'aller aux toilettes. Mais pour les plus aventureux, ce sont les cascades suspendues de Norvège que cette défaillance rappelle. Le fraicheur des glaciers. Le vide d'un oreiller. Le bleu de Briksdal, une mer qui inonde sans prévenir. Seule face à un lit trop grand. Mademoiselle Dotchault ne l'a pas vu arriver. Ce froid. Cette morsure. Elle s'est noyée dans l'immobilité de l'eau, elle a failli y rester. Comme figée par le temps, dans ses quelques centaines de mètres turquoises, elle a sentit son cerveau s'embrumer. Elle ne se rappelle de rien, ni du glacier scandinave, ni de la sensation de se sentir minuscule face à la violence de la nature. Non. Ce spectacle unique, vieux de quelques centaines d'années, elle n'y a pas assisté. Elle est montée, pourtant, pendant plusieurs heures, jusqu'en haut de la montagne. Écrasant les cailloux, évitant les rares pousses d'herbe, respirant le seul air pur à des milliers de kilomètres à la ronde. Seulement, arrivée en haut. Tout bloque. Arrivée en haut. Arrivée en haut. Arrivée en haut. Tout bloque. Elle ne se rappelle de rien, seulement le vague souvenir d'être allée aux toilettes. Elle a refusé de regarder. Elle a fuit devant tant d'évidence. Tout bloque, arrivé en haut. La beauté naturelle d'une cascade fait plus de ravages qu'un semblant d'eau distillée, dans un verre avec des glaçons. Elle n'a pas d'excuse. Sa tête n'était déjà plus là.

Elle garde juste près de son cœur la froideur de cet oreiller, et sa respiration se bloque sous la basse température d'un souvenir tout creux, remplis d'actes manqués. Les actes manqués, ca fait des dégâts. Les actes manqués, elle n'a pas eu le temps d'en avoir peur. Tout s'est passé tellement vite, comme la craie d'un vieux fou qui se brise sur son tableau noir. Il avait voulu écrire espoir. Clac. D'un coup sec, elle a eu mal, tout simplement.
Mademoislle Dotchault aurait aimé se rappeler. L'avoir vécu. A la place, il y'a un immense vide. A coté de son petit cœur gelé. La seule chose qu'elle a gardé du Brisksdal, c'est le froid de ses glaciers. Finalement il n'y a pas eu de séquelles, sauf elle. Sauf elle. Elle n'a pas eu d'chance.

Alors elle cherche, tous les bruits lui rappelant la cascade glacée. Toutes les sensations. Solitude. Froid. Afin de reconstruire ce moment. Tout. Jusqu'à la petite gouttelette d'un radiateur cassé.
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4 mars 2012

Coléoptères en rafale. Un jour, un fou a dit "On


Coléoptères en rafale.

 

 

Un jour, un fou a dit "On est jamais vraiment au début ni à la fin d'une histoire. On est toujours au milieu. Et c'est au milieu qu'on peut inventer."

La mine du critérium se casse, la pellicule chauffe.

Sur la première image, le petit moulin à vent bleu et blanc piqué dans le sol devant le 14 rue des Albatros annonce la froide saison. Gelé, il ne tourne plus depuis maintenant quelques semaines. Le tictac du temps est comme le vent qui souffle, irrégulier, imprenable et imprévisible. Il frappe à la porte au moment où l'on ne l'attends pas. Comme un voisin qui viendrait se plaindre d'une pollution sonore qui n'a aucun sens.
Oui, désolée monsieur. Je chante si je veux. Au revoir.
Il me regarde, son affreux sourire en plastique figé. Puis repart comme un pantin dont on aurait emmêlé les fils juste pour le plaisir de lui donner une bonne leçon.

On entend au loin le bruit répétitif d'une machine électrique. Qui tourne.

Les coléoptères ont bloqués leurs ailes en étui et s'abritent dans leurs carapaces. Dur hiver. Les pas des petits enfants absents résonnent dans la neige. L'école a recommencé parait-il, mains dans la mains ils retournent en classe, leur spleen gentiment rangé au font de leur cartable à coté de leur trousse de super héros et de leurs cahiers mordillés. Ils écoutent attentivement l'horloge.

Qui tourne.

Le grand père au numéro 17 de la rue, gare sa voiture à coté de ses buissons passablement taillés. Il a l'air tout content, je devine qu'il n'a pas trouvé de bois pour sa cheminé, et que par conséquent, il pourra boire du vin chaud sans scrupules durant tout le mois de décembre. Quel marin ivre. Que va-t-on de lui, et de son labyrinthe de rides poussiéreuses?

La bobine trouée glisse.

L'automate de voisin partit, je me remets à chanter. J'ouvre la porte de la cuisine, sors une assiette, un couteau, et découpe une petite part de tarte à la framboise posée sur la table.
Les petits grains croquent sous mes dents, c'est désagréable.
Une framboise tombe sur mon chemisier. Une nouvelle tache rouge entre dans la famille.
Ca fait assassin de fruits rouges. Une par une, je leur règle leur compte, accompagnées de crème fouettée. Je plisse les yeux sous l'effet de l'acidité et repose la cuillère. Méfait accompli.

En boucle.

Par la fenêtre j'entrevois le Vieux Billy qui traine ses os jusqu'à la boite à lettres. La pipe dans le coin de ses lèvres laisse entrevoir l'esquisse d'un sourire. Il a enfin reçu la lettre de sa petite fille, qui est en age d'écrire à présent. Son regard en dit long, il conservera ce bout de papier durant le reste de sa vie.

Comme une course poursuite, un circuit qui ne s'arrête jamais.

Un chat marche dans la neige tout lentement. Il s'appelle Pirate. Effrayé par ce tapis blanc posé sur son terrain de jeu, ses moustaches bougent. Voila plusieurs minutes qu'il est assis à contempler le vide. Ils sont comme ça les chats, ne rien faire est leur principale activité. Mais elle ne dure jamais longtemps... Il se retourne brusquement et aperçoit un petit oiseau bleu jouant sur la neige. A en comprendre la position de Pirate, la chasse est ouverte, il est pret à passer à l'abordage.

Une image qui court après une autre.

Les chasseurs d'arc-en-ciel errent dans la rue en quête d'aventure. Ils jouent à pierre-feuille-ciseaux afin de déterminer celui qui ira sonner à ma porte pour me refourguer une orange contre quelques maudites pièces jaunes. Egalité. Ils rigolent. Pour les départager, ça sera pile ou face.

24 fois par seconde.

Des rafales de vent débarquent dans le paysage, accompagnées de pluie. Elles obligent les quatre garçons à se mettre à l'abri. Pirate le chat, lui, court se réfugier sous une voiture. Il est 16h. Les petits enfants rentrent de l'école.
Ils sont contents. Jettent leur cartable hanté sur le bord du trottoir, et sautent avec leurs lacets défaits dans la rivière qui vient de naitre. Le galion a coulé au fond.

Générique de fin.

Ma vie est une bobine de film découpée, puis rescotchée n'importe comment, par un projectionniste qui lui, reproduit ce schéma 365 fois par an.

24 février 2012

début d'un truc pas fini. TRALALALA.

début d'un truc pas fini. TRALALALA.

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L'heure du noctambule a sonnée. 4 heures 23. Tic tac. J'ai les doigts qui me démangent. Sur le bord du lit, assis, je regarde les lacets de mes godasses se battre en duel. Y'en a un, tout déchiré. L'autre en parfait état. Ca symbolise un peu la dualité de l'homme, comme dirait n'importe quel étudiant en lettres, ou charlatant qui fait payer sa consultation plus cher qu'une nuit à l'hotel. Ca tombe bien. Je lis pas. Je vais pas voir de psy. Et j'aime pas les chambres d'hotel.
Je ne fais plus rien et j'aime pas grand chose.
Seulement là, j'ai la valise qui me titille. Une gorgée. Ca me picotte les bras au rythme d'une horloge encrassée. Tic. Tac. Pas d'horloge chez moi. Pas de ça. Les trucs à répétition, ca m'angoisse vous savez. Faire mes lacets ca m'angoisse. Je les fais pas, c'est pour ca qu'ils se battent. Ils passent le temps, ils ont meme l'air de plus s'amuser que moi. C'est un comble. Ils sont deux c'est p'tetre pour ça. A deux on s'amuse plus que tout seul, assis au bord d'un lit qui transpire la cigarette froide, et de draps délavés qui vomissent des cailloux. Je crois que c'est du sable. Deux gorgées. Des fois quand j'ai pas le courage de faire mes lacets, je me balade pieds nus. Et comme en ce moment j'ai pas le courage de grand chose, je me glisse sous la couverture qui gratte. Ca vient peut-etre de là. Ou du sandwich que j'ai mangé à l'instant. Des miettes dans le ventre ou des cailloux dans la tete? Tout ce que je sais c'est que chez moi c'est un sacré bordel. Va falloir encore que je fasse le ménage avant de retrouver ca dans un carton à l'entrée d'une cellule. Allez savoir quelle cellule.. Vite, trouver un pretexte pour ne pas le faire, oh, 4 heures 31. J'ai les orteils qui claquettent au fond de mes chausettes. Trouées. Et pour bien faire, dépareillées.
Trois gorgées. A mettre dans la valise : ° Chaussettes. 4

° Pantalon. 2

° T-shirt. 2

Tic Tac. La paranoia frappe à la porte de ma cage cranienne. Et ce qu'elle frappe fort, ca résonne.  Un peu de respect pour le mobilier, deja bien usé. Bonjour, vous voulez etre de la partie? Non il n'y a plus de place desolé, repassez me hanter plus tard. Si vous pouvez, quand je serai en prison, ca m'occupera pas mal, car si ils me retrouvent j'en prends pour longtemps. Et Brindavoine ne pourra pas me rendre la pareil. ouais. Dans sa cage en béton armé, la bourgeoise moisie. Bourgoisie moisie, drole de rime, je trouve que c'est plutot juste.

° Caleçon. 4

° Pull. 6

° Gant. 2

° Brosse à dent. 1
Le reste, je le volerais dans des toilettes publiques. Je n'ai plus trop d'argent depuis que mon unique source de revenue est passée derière les barreaux. Ce n'était pas très légal mais cela suffisait à rester un minimum propre. Les savons près des lavabos font d'excelents produits douche, et les essui-mains n'éssuient pas que les mains. Sachez-le.

° Livre. 1
Survivant de Palahniuk. Ca commence par un crash en avion. Mise en condition. On va rire.
 
° Carnet. 1
J'en ai des choses à vous dire. Vous n'avez pas idée.

° Paquet de bonbons au miel. 2
tic tac
Les bonbons au miel ca atténue mes tics tacs. Allez savoir pourquoi. On s'est moqué de moi une fois, en me disant que ca ne changeait rien du tout. Que ce n'était qu'un pretexte pour en manger. Quatre gorgées. C'etait une fille qui ne supportait pas qu'on lui touche ses pouces, comme voulez vous etre crédible quand vous avez ce genre de comportement. Mais c'est vrai que c'est bon, les bonbons au miel.

° Billet d'avion 1
L'allé seulement.

Récapitulons...
4+2+2+4+6+2+1 = 27 (à recompter)

Angoisse. Je dois rajouter quelque chose d'impair, sinon mon avion s'écrasera. Je n'ai pas envie de faire de remake de livres que je n'ai pas encore lu. Savoir la fin avant d'avoir vu le début, ca ne m'interesse pas. Et ce mécanisme qui résonne...
Une paire de lunettes de soleil cassée fera l'affaire. Pas convaincu que ca soit utile à Berlin, en plein mois de décembre. Mais bon. Je prefere une vision sombre et rayée à un crash aérien. En plus, on ne me reconnaitra pas comme ça.

° Paire de lunette de soleil cassée. 1

Le compte y est. Je respire. Je vais enfin pouvoir partir, et me libérer. Si je reste un jour de plus dans ce trou à rat, ils vont me trouver. Et je finirais comme lui. Ou comme ses 14 personnes. En prison, ou étranglé. L'un n'est pas plus réjouissant que l'autre. Cinq gorgée. La cigarette mordillée tient en équilibre à coté de ma bouteille. Je m'appercois que depuis trente minutes je bois sans m'en rendre compte du sirop pour la toux. Rose. Et c'est meme pas bon. Vu la couleur de l'étiquette, ca doit etre le premier prix de la game à saveur "sirop pour la toux". Preferer les bonbons au miel. Ou le vin.
On m'a dit que ca réchauffait le coeur. Oui. Et aussi que ca niquait le foie.
Mon cendrier est tout juste assez fumant pour m'empecher de tout faire bruler. Mes engrenages se dérouillent un peu.  Je me leve. Fenetre fermée. ok. Volet fermé. ok. Chat.
Ai-je confié le chat au voisin?
Ah non. Plus de chat. C'est vrai.. Lui aussi a fuit la pendule.

Je crois que tout est pret. Mon avion est dans quatre tours d'horloge.
Je vérifie une derniere fois l'heure de mon bus. Raté à l'instant. Et a 5 heures et des poussières du matin, ce genre de carcasses courent pas les rues. Direction la station de métro la plus proche. Dans le creux de mon oreille, il y'a un savant fou qui prends son pied en faisant grésiller une radio et tinter des grelots contre ma parroie métalique. Cling. De manière réglière. Cling . Il y'a des cailloux qui font la fete aussi, ca s'entrechoque un peu trop à mon gout. Tapage nocturne. Cling. Je me venge en prennant cette fois ci, un verre de vin. Ca les assomera un peu. Ou alors ca sera moi. Tout le monde s'amuse dans mon crane. Au rythme cadencé du minuteur. Pour la peine, j'me casse.

Fermer la porte, a double tour. Deux fois toujours. Tic Tac.
Se retourner, verifier si elle est bien fermée.
Partir. tic.
Revenir. tac
La réouvrir. Refermer.
Mais la question que je me pose réellement ce n'est pas si cette satanée porte est bien fermée, non... Mais pourquoi je fais ca? tic tac. Ses foutus ptérodactyles qui me grattent l'interieur de ma tete. C'est ça la réponse. J'ai toujours eu un problème pour passer les portes. Pour les fermer. Et pour quitter un endroit. C'est comme si je quittais une partie de moi meme. Que je m'effaçais. Alors la seule solution que j'ai trouvée, c'est de m'acharner dessus. Preferer le terme solution qu'obsession.
Ca me rappelle une anecdote que j'ai entendue il y'a peu. Un homme qui gardait tous ses mégots de cigarettes et ceux des gens avec qui il discutait. Et il les ramenait chez lui le soir. Il avait une pièce rien que pour ça. Apparemment il ne supportait pas qu'une partie de lui meme soit jetée à la poubelle, éparpillée. Perdue. Alors il gardait tout, pour ne pas se perdre lui meme.
Mouais.
Il y'a vraiment de ses cinglés en ville de nos jours.
J'ai les poches pleines de mégots, mais c'est juste faute d'avoir autre chose à y mettre.
tic tac.
L'horloge du gardien m'insupporte.  Ses nuits sont deja longues, pourquoi compter les minutes? Les secondes, qui se n'arretent jamais. jamais. jamais. jamais. J'ai l'impression d'ettoufer, comme si ma respiration suivait le rythme et que je manquais d'air. Un métronome dans la tete, sans fin.. En boucle. Sauf si on le casse, ou que l'on enleve les piles.  
Quand j'ai pas le controle sur les choses, je deviens irritable. Je deviens mécaniquement fou. Un avion en mode pilote automatique, qui n'a pas envie de l'etre. Savoir qu'il n'y aura jamais d'imprévu et que tout est déjà fixé, aseptisé, ca me donne le tournis. J'ai deja envie de vomir avant d'embarquer dans les airs.
J'aime les disques rayés, le métro en retard de ses 4 minutes d'attentes, la machine a café qui  met trois batonnets en plastique alors que je n'ai pas demandé de sucre. Les feuilles de livres qu'on a oublié de découper. Les bonbons collés entre eux dans le paquet avant meme la sortie de l'usine.
Tout ce qui n'est pas régulier, et prémédité.
Tout ce que l'on peut inventer.
Raturer, acceler, dévier. Et arreter, pour aucune raison particulière.  
C'est pour ca que les tics tacs ça m'angoissent. C'est pour ca que mes faire mes lacets ça m'angoisse, ils sont destinés à se rencontrer. C'est inévitable. J'aimerai les couper. Acheter une fermeture éclaire, et faire sauter le système.
En parlant de faire sauter le système, je disjoncte, et mon avion ne m'attendra pas. La porte est enfin bien fermée. Pour les besoins de la cause, j'ai ma valise en main, les pieds sur les rails direction l'aéroport et la liberté. J'acheterais des chaussures à scratch sur le chemin.
Ai-je bien éteins le gaz?
Toujours le meme problème.

24 février 2012

Raskass d'un Tictocard prisonnier. - Bon alors,

Raskass d'un Tictocard prisonnier.



- Bon alors, ça sera quoi, hein?

Il y avait moi, autrement dit Alex, et mes trois compagnons, autrement dit Le Tiroir Caisse, La Vitre, et Mon Siège. Le Tiroir Caisse est à moitié vide, La Vitre me sépare des clients et de leur sale haleine, et Mon Siège lui, se dévisse sans arrêt. Belle équipe de bras cassés.

On m'a collé à la caisse de ce foutu cinéma. Le Royal. C'est tzarrible. Ils m'ont vu débarqué le jour de l'entretient et ils se sont dit que j'avais une parfaite gueule pour passer en haut de l'affiche. Puis après, ils m'ont vu m'assoir sur leur tabouret grinçant, et ils se sont dit cette fois que j'avais une parfaite gueule pour passer derrière la caisse. Merdzkoi. Une parfaite gueule de caissier. Vous y croyez? On m'la fait pas. J'essaye de voir le coté positif, derrière cette vitre, je peux garder mon chapeau. Il va bien avec mon costume blanc. C'est ma tenue de travail personnelle que je me suis autorisée moi-même. Je me sens bien dans ces platrusques usées. Le faux-cil j'ai du l'enlever depuis que mes protèges-glaze me font mal.
C'est la mortissure derrière cette vitre. Les gens vous prennent pour un petit animal en exposition dans un de leurs minables zoos qui sent l'urine stagnante et les bonbons trop sucrés tombés au sol. Ils y vont le dimanche après midi avec leurs gamins, ils payent leur place comme de bons bugattis, et ils sont contents d'avoir vu ce petit singe entouré de bananes en plastiques, ou ce beau serpent aux couleurs acryliques. J'ai toujours trouvé ca dégueulasse. Surtout depuis que c'est moi le reptile que l'on lorgne derrière ce messtot à la noix. Les animaux je m'en carre autant que mon premier sabog, mais comme j'ai le gulliver qui me cogne, je me dis qu'il se calmera peut-être si je dis quelque chose dégoulinant de bons sentiments.
Alors qu'on le sait tous : c'est chacun pour sa gueule ici.

- Bon alors, ça sera quoi, hein?
.
Cette phrase résonne à la sortie de ses goubeuses gercées. Elle cache ses encoches rebondissantes sous un t-shirt trop large, jaune moutarde. Dégueulasse. Sa crinière, elle, me rappelle l'ignoble soupe aux carottes paternelle, et son glazard, quand à lui hésitant, n'arrange rien. Ce n'est pas du tout le genre de minettes que l'on croiserait dans un magaze pour adultes, non, vraiment pas. Je réfléchis mécaniquement durant deux secondes.
Elle fera l'affaire.
J'ai quand meme l'envie incoercible de jouer aux gulligulivices avec elle... Tout comme les centaines de jeunettes qui piaillent chaque jours devant mon guichet. Ca fait désésperé, mais il y a longtemps que je n'ai pas peché de la dévotchka. Le dedans-dehors, c'est pas monnaie courante en ce moment. J'ai mis autant de billets de 20 dans mon tiroir caisse, que de paires de charrières dans mon lit depuis ce dernier mois. C'est à dire deux et demi. Deux billets de vingt, et une contrefaçon. Deux jolies p'tites dévotchkas avec leurs encoches de reves, et une contrefaçon. Oui. C'était un homme, je ne m'en suis rendu compte qu'au moment où j'ai apperçu une de ses yarbilles dépasser. Un putain de grassou, que notre ville ne reverra pas de si tot.

- Bon alors, ça sera quoi, hein?

Pour passer le temps je mets un peu de musique. Beethoven. J'aime bien. Je peux aussi vous raconter les petites raskass de tous les jours. Quand on est, comme moi, le chef d'un équipage constitué d'un Tiroir Caisse, d'une Vitre et d'un Siège, on s'occupe comme on peu. Alors je parle aux gens, comme vous appuyés sur le comptoir, ou bien je regarde le paysage. Souvent c'est la longueur des jupes, et la profondeur des décolltés. C'est intéressant, mais si vous voulez en savoir plus, allez faire un tour dans le vieux kino du Void, histoire de regarder ses cochonneries dans le noir comme tous les autres! On y trouve une faune bien particulière, mais pourtant très diversifiée. C'est ici que j'ai rencontré le vilain grassoussou. Habillé d'une robe à paillettes, les cheveux longs. Comment j'aurais pu deviner? Voyons, on fait tous des erreurs. Si vous voulez donc entendre parler d'histoire de dedans-dehors, courez-y, je ne vous en voudrais pas. J'y vais moi-même souvent, tantôt avec quelques drougs, tantôt seul. Le plaisir est différent, mais généralement là. Si votre truc c'est le glauque, évidement.
Sinon, restez, et vous aurez peut-être l'équivalent d'un film de série B sur un écran huit mètres sur cinq, froissé. Les pop-corns ne sont pas offerts, et la conficonfiotte non plus.

- Bon alors, ca sera quoi hein?

Une fois, je ne tenais plus en place. Quand on reste assis toute la journée sur ce bon vieux Siège tout déglingué, et que l'on boit du moloko à chaque pause, c'est à dire toutes les trois heures, on doit aller se libérer aux water-closet. Ce jour là j'étais un peu pianitza, mon corps distillait encore des vapeurs d'alcool à deux mètres à la ronde. L'avantage de bosser derrière une Vitre, c'est qu'en plus du coté inhumain de la chose, on peut être gouspineux et sentir la forella, personne ne vient nous emmerder. La Vitre fait barrière de protection. Pensez-y la prochaine fois que vous serez à un guichet et que vous verrez cette Vitre glaciale qui vous sépare de votre interlocuteur. Peut-être qu'il sent le viokcho. Moi en tout cas je suis bien content de n'pas vous sentir, vous avez un de ses airs éberloqués des fois, 'faut vous-y voir. Je clopais aléatoirement jusqu'à l'endroit tant convoité - les commodités. Quand j'ai du spoutik dans le sang, il ne faut pas m'énerver. Y'avait un veck, il m'a vu arriver et a dit avec sa golosse ridicule, genre directeur de cirque, "Euh, c'est vous qui vous occupez des toilettes? Il n'y a plus de papier." Petit merdzkoi. Ni une ni deux,c'est ma cancerette qui s'est écrasée sur son front . Moi j'étais complétement razdraze, et lui, il critch critch critchait sans arrêt. Ça s'est finit à coup de grosses godasses sur les doigts. Il lui en faudra, oui, du papier, pour essuyer tout cette saloperie rouge. Un fois ce bazar fait, je suis allé me soulager dans une cabine.

- Bon alors, ca sera quoi, hein?

Oh, la vieille Valérie avec ses mains froides débarque comme un phoque devant moi. Elle me glousse un "une place pour Zardoz". Quel film. Même le p'tit Jésus n'irait pas voir ça. Elle ajoute avec son gros menton graisseux un "enfin deux, si on compte le petit en route". Ah. Un polichinelle dans le tiroir. Mais vu sa tête, le contenu de mon Tiroir caisse aura certainement meilleure allure. Elle caquette un "Merci" et s'en va sous la pluie, tellement un dindon qui aurait avalé un ballon de football. J'aime bien quand il pleut, ca m'donne envie de égosiller la golosse en chantant. En Chantant sous la Pluie. Ça me rappelle avec mon p'pa quand j'étais haut comme trois pommes. Ça m'rappelle un tas de trucs d'ailleurs, bien plus récents.
Mon siège s'est encore dévissé. Je me lève, le fait tourner, et me rassois. Il me fait mal aux yarbilles, c'est tzarrible.
Y'a une p'tite vieille, elle vient tous les jours me voir. Elle ne regarde aucun film, elle n'a pas l'argent. Elle vient là, pour me parler.
Une fois c'est ce vieux bézoumni de projectionniste, Anthony, qui est v'nu me voir. Il m'a demandé si je n'avais pas vu la bobine n°3 d'un film à dormir debout. Je lui ai dit que pellicules de kino j'en avais jamais vu dans ma p'tiote de vie. Et je m'disais que ca devait pas bien etre solide. Il m'a dit, que c'était si solide qu'on pouvait se pendre avec. Mortissure. J'ai eu le tictocard qui s'est emballé. Tic tac.
Depuis cette information, on a plus revu Anthony. Ne me jetez pas de regards accusateurs avec vos grands glazes ouverts. Il n'avait qu'à rien dire. En parlant d'ouvrir grand les glazes, v'la une jolie tchina toute sophistoque qui frappe contre le carreaux. Elle respire le tilt, le fric, a plein nez. Je lui répond, d'un air absent histoire de la faire variter, un

- Bon alors, ca sera quoi hein?

- Le dernier de Kubrick, deux places s'il vous plait.

- Ah, pas possible ma p'tite chérie, la collocolle annonce la pause. Exqui cucuses usées. C'est l'heure d'aller se prendre un petit moloko au distributeur.

- Mais ca ne prendra qu'une minute.

- Vous voyez, y'a marqué Fermé. Vous n'aviez qu'à arriver plus tot. Soit dit en passant, l'histoire d'un tchelloveck ultra-violent qui tappe tout le monde avec sa canne ça arrive tous les jours. Allez donc voir celui la rediff' de Resnais, il parait qu'elle est à mourir de rire.

24 février 2012

Un jour, un fou a dit "On est jamais vraiment au

Un jour, un fou a dit "On est jamais vraiment au début ni à la fin d'une histoire. On est toujours au milieu. Et c'est au milieu qu'on peut inventer." La mine du critérium se casse, la pellicule chauffe. Sur la première image, le petit moulin à vent bleu et blanc piqué dans le sol devant le 14 rue des Albatros annonce la froide saison. Gelé, il ne tourne plus depuis maintenant quelques semaines. Le tictac du temps est comme le vent qui souffle, irrégulier, imprenable et imprévisible. Il frappe à la porte au moment où l'on ne l'attends pas. Comme un voisin qui viendrait se plaindre d'une pollution sonore qui n'a aucun sens. Oui, désolée monsieur. Je chante si je veux. Au revoir. Il me regarde, son affreux sourire en plastique figé. Puis repart comme un pantin dont on aurait emmêlé les fils juste pour le plaisir de lui donner une bonne leçon. On entend au loin le bruit répétitif d'une machine électrique. Qui tourne. Les coléoptères ont bloqués leurs ailes en étui et s'abritent dans leurs carapaces. Dur hiver. Les pas des petits enfants absents résonnent dans la neige. L'école a recommencé parait-il, mains dans la mains ils retournent en classe, leur spleen gentiment rangé au font de leur cartable à coté de leur trousse de super héros et de leurs cahiers mordillés. Ils écoutent attentivement l'horloge. Qui tourne. Le grand père au numéro 17 de la rue, gare sa voiture à coté de ses buissons passablement taillés. Il a l'air tout content, je devine qu'il n'a pas trouvé de bois pour sa cheminé, et que par conséquent, il pourra boire du vin chaud sans scrupules durant tout le mois de décembre. Quel marin ivre. Que va-t-on de lui, et de son labyrinthe de rides poussiéreuses? La bobine trouée glisse. L'automate de voisin partit, je me remets à chanter. J'ouvre la porte de la cuisine, sors une assiette, un couteau, et découpe une petite part de tarte à la framboise posée sur la table. Les petits grains croquent sous mes dents, c'est désagréable. Une framboise tombe sur mon chemisier. Une nouvelle tache rouge entre dans la famille. Ca fait assassin de fruits rouges. Une par une, je leur règle leur compte, accompagnées de crème fouettée. Je plisse les yeux sous l'effet de l'acidité et repose la cuillère. Méfait accompli. En boucle. Par la fenêtre j'entrevois le Vieux Billy qui traine ses os jusqu'à la boite à lettres. La pipe dans le coin de ses lèvres laisse entrevoir l'esquisse d'un sourire. Il a enfin reçu la lettre de sa petite fille, qui est en age d'écrire à présent. Son regard en dit long, il conservera ce bout de papier durant le reste de sa vie. Comme une course poursuite, un circuit qui ne s'arrête jamais. Un chat marche dans la neige tout lentement. Il s'appelle Pirate. Effrayé par ce tapis blanc posé sur son terrain de jeu, ses moustaches bougent. Voila plusieurs minutes qu'il est assis à contempler le vide. Ils sont comme ça les chats, ne rien faire est leur principale activité. Mais elle ne dure jamais longtemps... Il se retourne brusquement et aperçoit un petit oiseau bleu jouant sur la neige. A en comprendre la position de Pirate, la chasse est ouverte, il est pret à passer à l'abordage. Une image qui court après une autre. Les chasseurs d'arc-en-ciel errent dans la rue en quête d'aventure. Ils jouent à pierre-feuille-ciseaux afin de déterminer celui qui ira sonner à ma porte pour me refourguer une orange contre quelques maudites pièces jaunes. Egalité. Ils rigolent. Pour les départager, ça sera pile ou face. 24 fois par seconde. Des rafales de vent débarquent dans le paysage, accompagnées de pluie. Elles obligent les quatre garçons à se mettre à l'abri. Pirate le chat, lui, court se réfugier sous une voiture. Il est 16h. Les petits enfants rentrent de l'école. Ils sont contents. Jettent leur cartable hanté sur le bord du trottoir, et sautent avec leurs lacets défaits dans la rivière qui vient de naitre. Le galion a coulé au fond. Générique de fin. Ma vie est une bobine de film découpée, puis rescotchée n'importe comment, par un projectionniste qui lui, reproduit ce schéma 365 fois par an.
24 février 2012

Fiche Personnage Aleksandr Tchavelski(Voici, ici

Fiche Personnage Aleksandr Tchavelski


(Voici, ici une fiche personnage que j'ai réalisée pour un autre forum, j'ai tenté au maximum d'enlever le contexte créé pour et par le forum-et de le remplacer. Je n'ai gardé que ce que j'ai inventé moi-meme . L'histoire se passe dans les années 2040.

Un personnage qui me plait beaucoup et à qui j'aimerai donner une vie dans des textes futurs, et réussir à trouver une manière peut-etre plus subtile de le faire vivre. Je bosse sur une nouvelle avec lui en ce moment. )













Russe.
C'est la première chose que l'on voit sur mon visage parait-il. C'est du moins ce que l'on me crie dans la rue quand on me voit passer. Ou qu'on entend mon nom. Aleksandr Tchavelski. Un nom où tu postillonne plus de trois fois en le prononçant, ca passe pas aussi bien qu'un John Pitt, ou qu'un James Allan.
Russe, Russe. et Russe.
Ca résonne dans la tête comme un marteau tapant sur un clou. Tic tac. Et ca fait aussi mal qu'un marteau tapant sur un clou d'ailleurs, lorsque c'est dit comme vous le dites, vous, ici à Chicago Avec cet air insultant, celui qui dit "toi, ta p'tite gueule de communiste, ton grand nez tordu, ton mètre quatre-vingt, tes jeans troués, ta moustache outrageuse et ta jolie p'tite peau claire, n'ont strictement rien a faire ici dans l'Illinois." Moi qui croyait pourtant que l'Amérique était un pays qui accueillait a bras ouverts les pirates des quatre coins du globe... Décidément, des foutaises, vous savez en dire vous les américains!
Dans la rue on me crie aussi que je suis sale. Mais ca j'y peux pas grand chose, c'est à cause de mon compte en banque. Quand votre fortune personnelle ne dépasse pas celle de votre dent en or, vous savez que vous n'aurez pas de quoi vous payer de l'eau chaude ce mois-ci, ou l'eau tout simplement. Je suis peut-être habitué aux durs hivers russes agrémentés d'alcool de pomme-de-terre, cela n'empêche que quand il n'y a plus d'eau, il n'y a plus d'eau. Conséquence. On ne se lave pas aussi souvent qu'on le voudrait. Mais on s'y habitue, tic tac, je vous rassure.



Pierre avait un coeur à l'image de son prénom. Il avait un coeur explosé en mille morceaux, un coeur a ramasser à la petite cuillère. Pierre avait un coeur gelé, glacé comme simple caillou. Un jour il est allé dans les catacombes. Catastrophe, des caillasses sur la caboche. Le coeur de pierre s'est fendu en deux. Il est tombé, a terre. Inerte. Voila l'histoire de Pierre.
Palpitant non?

Maintenant voici la mienne, un p'tit peu plus compliquée, puisque ce n'est pas un caillou qui m'est tombé sur la tête, c'est ma tête qui est tombée sur un caillou. Un immeuble de 5 étages, ca pardonne pas. J'avais 8 ans la vie commence bien. Ouais, on a pas tous du bol...

Hep! Je suis sure que vous mourrez d'envie de savoir ce qui a pu passer dans la tête d'un gamin de 8 ans pour qu'il saute d'un immeuble de 5 étages. Mais avant de connaitre cette petite anecdote riche en émotions, il faut d'abord passer par ma jolie naissance, o combien dégoulinante d'amour et de liquide un peu moins mignon.



Je suis né l'année où le monde a commencé à partir en vrille. On parle, on parle, il se fait tard, le monde part en vrille mais qu'il aille donc se faire. Oui, il est allé se faire voir. Suffisamment bien puisque, neuf mois plus tard, c'est moi qui me faisait voir au monde entier. Ou juste au vagin de ma mère, aux yeux de mon père et aux douces mains de la sage femme de l'hôpital de Kiev, m'enfin, c'est plus ou moins la même chose quand on est gosse, on croit toujours être le centre du monde. La Russie elle commençait à réaliser qu'elle ne l'était plus vraiment.
J'ai donc passé quelques années dans l'insouciance la plus totale, puisque quand on est bébé la seule chose qui nous intéresse réellement est de manger, et dormir. Le chômage lui, revenait à la mode, tout comme la vodka. C'est ainsi que mon père ouvrait la porte chaque soir, au top de la mode. Sans boulot, et avec autant de grammes dans le sang que de bougies sur mon gâteau d'anniversaire. J'avais trois ans. Joli cadeau.

Cinq ans plus tard, j'ai voulu jouer au super héros. Revoilà la fameuse anecdote de l'immeuble. Vous les américains, vous aimez bien toutes ses histoires de super héros, là, les trucs un peu old school à la Spiderman et compagnie, ca va vous plaire! Adossé au rebord de la fenêtre, un collant noué autour de la tête avec des trous au niveau des yeux, et une serviette de bain faisant office de cape j'ai voulu voir si je volais. J'y ai cru. J'ai sauté. "C'est un appel au secours" disait Monsieur Knovgovitch. Moi je pense que je voulais surtout frimer devant les copains. D'ailleurs, quand ma tête a heurté le bitume de la banlieue d'Odessa, ca a été radical. Les copains, je ne les ai plus revus. Je me suis coupé du monde, comme l'était la Corée du Nord à cette époque. J'ai arrêté de parler aux autres, pour faire quelque chose de bien plus intéressant. J'ai commencé a parler à moi-même. 5 Étages. 8 Ans. Ma vie allait désormais etre rythmée de chiffres, de nombres, de lignes, de sons et de défis impossibles à réaliser. Certains appelle ca des troubles obsessionnels compulsifs, moi j'appelle juste ca un enfer.


Le 17 février 2021, je pensais être le petit garçon le plus important du monde. Mais je me suis vite rendu compte quand non. La Chine m'a volé ma journée d'anniversaire en déclarant sa troisième guerre le meme jour, et le chomage, vedette numéro 1 depuis une décennie, m'a volé mon gâteau. Le compte était là. Onze bougies pour moi, et trois grammes pour le sang de papa. Le bébé dans le ventre de sa maitresse, lui, n'était pas censé faire parti de l'équation. C'est ainsi qu'entre son claquement de porte, et les pleurs de maman, je me parlais tout bas, et me souhaitais malgré tout un joyeux anniversaire.

Les dix années qui ont suivies, j'ai passé mon temps à subvenir aux besoins de ma mère et de sa difficulté a remonter la pente - et pour le coup, le compte en banque. J'ai pris tous les petits boulots qui s'offraient à moi. Le travail à la chaine je n'ai pas supporté. Les choses a répétition ca m'angoisse vous savez, 1 2 3 4 faire mes lacets ca m'angoisse, 5 6 7 8 assembler une pièce à une autre ca m'angoisse. 9 10 11 12 faire toujours le meme trajet ca m'angoisse 13 14 15 16 les horloges ca m'angoisse, 17 18 19 respirer ca m'angoisse Tic tac tic tac. BOUM. Excès de colère d'avoir quelque chose qui me contrôle, qui m'échappe, j'ai tout cassé. La machine, mes lacets, et j'ai dansé, la tete cognée contre les murs. Durant ses dix années j'ai beaucoup trainé avec mes soucis dans les poches.


En 2032 je crois je me suis refait un ami, le premier depuis des années. Il etait un peu bizarre, comme vous là, c'était un americain quoi. Billy qu'il s'appelait. On parlait pas mal politique, lui me parlait de sa culture americaine, et moi je citais Bakounine ou Kropotkine. On s'est bien amusés tous les deux, il m'a fait découvrir un tas de choses. La vodka je connaissais et je l'ai redécouverte de manière plus joyeuse qu'avec mon père. Ensuite ce furent les médicaments pour rigoler, et les filles pour se changer les idées. Ce fut une période mémorable de ma vie. La vingtaine, aah... Prendre des drogues m'aidait à surmonter mes défis, les tic tac résonnaient moins dans ma tete, la répétition était irrégulière puisque tout était chamboulé et sans dessus dessous, et cela me permettait de respirer. Seulement le chomage etait plus fort que jamais à Odessa, et très vite, l'argent manqua pour résoudre mes équations mathématiques internes.
Billy m'a proposé de le suivre en Amerique, avec un grand A. Quand vous venez de la banlieue d'Odessa, et que vous atterrissez en Amerique, vos avec un tas d'idées reçues en tete. Ce sont les ennemis, blablabla. Ouais, bon, je n'ai pas l'habitude de croire ce que l'on me dit mais en définitive, j'ai connu plus aimable que vous...

Je suis arrivé le 19 juin 2031. Quand j'y repense, si j'étais arrivé trois ans plus tard, j'aurai du rentrer directement au pays en passant par la case "garde à vue" et ma vie se serai consumée petit à petit, sans grand interet. Un tete à tete entre l'alcool local et mon foie. Devinez qui aurai remporté la manche. Cette année là, je foulais donc pour la premiere fois des terres inconnues. Je respirais. J'avais évidement de la peine à laisser ma pauvre mère seule, mais j'avais besoin de vivre et de partir de toutes ses addictions et coups de marteau qui hantaient ma tête. Imaginez vous, un nouveau paysage, tout est inconnu, rien n'est à calculer. La délivrance.


C'est ce que je croyais.
Billy m'a présenté à ses amis américains. Chicago est une grande ville, j'étais un peu perdu alors je restais avec eux quand ils me le permettaient. Ils parlaient souvent politique. J'en ai donc conclu que la Russie n'avait pas grand chose à envier à l'Amerique.. déception. Ils se regroupaient souvent dans les sous sols à ce que j'entendais J'ai hésité pendant un moment à les rejoindre, mais je me suis dit que j'avais deja mes problèmes a regler. Sans papiers, sans boulot, car impossible à décrocher, je désespérais, et tout résonnait de plus en plus dans ma tete. Je traversais les grands boulevards au feu rouge pour contrer la monotonie, j'évitais de prendre le métro qui passe toutes les deux minutes. tic tac. deux minutes. tic tac. une minute. tic tac Laissez moi sauter sur les rails les amis. tic tac. L'enfer revenait progressivement.

L'enfer n'était d'ailleurs pas que pour moi, mais pour toute l'Amerique. Il y'a un truc qui se passait, au niveau des boulots... Comme je ne voyais pas beaucoup de monde, et que je ne sortais pas de chez moi, je m'en suis pas beaucoup inquiété. Puis d'un coup, comme ca, il y'avait beaucoup moins de gens dans la rue. Quand je sortais faire les courses, les magasins étaient fermés. Je me suis demandé ce que faisait le gouvernement. La réponse était partout dans la rue, et sur les panneaux d'affichages. Il était trop occupé a se faire dessus. Démission. Le trois est un chiffre à la mode. Trois jours, trois, tic tac tic, équilibre bancale. Il a fallu seulement trois jours à ses enflures du Void pour s'attirer les graces du peuple. tic tac. Elus à la majorité. En y repensant, j'enrage de ne pas avoir eu ma carte d'électeur à temps. J'ai jamais aimé l'administration, ils ne font que tout ralentir. D'ailleurs je n'ai jamais aimé non plus le gouvernement. Ils nous embrouillent. Vous voyez la vodka? Et bien, elle a l'air inoffensive, sans danger. On ne peut la prendre dans les mains car elle coule de tout cotés. Le gouvernement c'est pareil. Il a l'air calme, il est quasiment imprenable, et s'infiltre partout. Et en plus de ca, il nous fait passer pour fou. La solution pour se débarrasser des deux? Faut que ça brule!

Le 11 novembre 2033, a été la journée qui a changé ma vie. Imaginez, le 11/11/33. L'angoisse. Ma journée a été ponctuée de 11 et de 3. Trois gorgées le café. tic tac Onze pas pour aller à la salle de bain. tic tac Trois fois se brosser les dents. tic tac Onze Cigarettes en trois heures. tic tac . DRING. Le téléphone sonne. C'est Billy. il veux me voir. il a un truc important à me dire. il peut me trouver du boulot. Je sors vite de l'appartement ayant pris soin auparavant d'avoir raccroché le combiné trois fois.
Il veux que je teste une expérience. Ca fera un peu mal mais grace à cela je pourrais avoir n'importe quel travail, pourvu que je garde cette opération et ceux qui y ont contribué secrets. Aucun soucis, je n'ai personne à qui en parler.. C'est gratuit, et en échange il me donne un petit peu de votre drogue locale là.. tant que j'peux grappiller deux trois trucs, je ne dis jamais non. Meme si c'est un truc clandestin.
Nous étions dans une petite cave, j'ai eu les yeux bandés avant d'arriver ici. Je ne me rappelle de rien, a part de m'etre réveillé avec une horrible migraine, et une douleur en bas de ma colone vertébrale. Apparemment j'ai arreté de vraiment etre un humain ce jour là. Je n'ai pas compris tout de suite. Je suis rentré chez moi avec l'impression étrange que tout le monde me suivait, que tout le monde me regardait. Les oiseaux auraient eu des caméras sur eux, ca ne m'aurai pas étonné. Je suis arrivé dans mon appartement, j'ai écrasé en poudre les cachets que m'avait passé Billy, et j'ai tout pris. Trois lignes, évidement. tic tac. Et là, un feu d'artifice dans mon nez. Explosion, tic tac implosion, mieux que le napalm ou que la nitroglycérine. jouissif. Je n'ai jamais connu ca. Je savais ce qu'il y'avait en moi. Molécule par molécule. Tout. Je savais comment refaire ces cachets à l'identique. Je n'ai pas très bien compris pourquoi, mais ce jour là, j'ai trouvé du boulot.

La chimie, que je n'avais jamais étudiée avant, est devenue un jeu d'enfant. J'ai décroché, moi, le petit russe d'Odessa, ses chaussures trouées et sa moustache qui fait tache, ...j'ai décroché un job à l'université! Alors que je n'y avais jamais mis les pieds étant gosse.
A partir de ce moment là, la vie est devenue différente, j'avais la capacité de me fournir ma dose quotidienne pour empêcher les tics tacs dans ma tete. J'avais aménagé un labo pour la cuisine dans le sous sol de l'université, le seul soucis était l'approvisionnement en matériel. La plupart des cuistos de Chicago sont de vrais cons. Ils te rembarrent direct, et si tu ne te fais pas tuer tu as bien de la chance. Je suis tombé sur un mec, Cornélius, un gars un peu dérangé qui se parlait tout seul, il m'a dit que comme lui ne fabriquait que des drogues "rétros", je n'étais pas un danger pour lui, et il m'a indiqué la manière la plus simple de trouver de quoi faire ma cuisine sans soucis.

24 et 3 font 27. 27 pas jusqu'à la station de métro. pas un de plus, pas un de moins. Gauche droite 1, 2, 3, 4. Gauche droite. 5, 6, 7. Ne pas confondre, 8, 9, 10, ne pas mélanger. 11, 12. Gauche droite. Je m'arrête pour laisser passer la voiture. 13, 14. Gauche Droite. 15 Suivre la ligne. 16, si je ne la suis pas, 17, je tombe. Je MEURS. tic tac 18, 19, 20. Passage piéton. 21. Ne marcher que sur les traits blancs. 22, 23. Ma nuque se brisera sinon. 24. gauche. 25. droite. Il reste trois mètres et seulement deux pas. Si je n'y arrive pas, je vais me faire tirer dessus dans la journée. Penser droite gauche droite gauche. Je prends mon élan, aller Aleks tu peux l'faire. 26.... 27! Victoire. Ce n'est pas aujourd'hui que ma vie s'arrêtera.
Les gens pensent que la vie est simple quand on ne parle pas aux autres, car parait-il on n'a pas à s'occuper de leurs problèmes. Le truc c'est que du coup, on se parle à soi meme, et on s'attire tout un tas d'autres problèmes, qui ne nous laissent jamais en paix. Souvent je me retrouve dans mon lit, en pleine nuit, les yeux grands ouverts. A attendre que ca passe, tic tac tic tac. Mais on sait bien que ca ne passera jamais vraiment. Quand j'étais encore à Odessa, je tournais à la vodka, pour mieux avaler ces problèmes et les noyer. Tic tac tic tac. Ici, je teste de substances, comme un masque de fer pour mieux se voiler la face. Ca marche plutot pas mal. Ca m'empeche de trop imaginer. L'infirmière de l'université ou je bosse (et non le médecin, car ça coute sacrément cher de se soigner dans votre pays là...) m'a dit que ce genre de maladie ca se soignait pas. Alors j'en invente, des médicaments pour mon imagination..


Le jour j'enseignais aux éleves de l'Université ce que les manuels de l'état me disaient d'enseigner. Rah, ses connards du Void élus, le monde devenait invivable..
Les soirs de semaine j'ai donc pris l'initiative de donner des cours particuliers à certains de manière totalement illégale, le sujet étant "comment fabriquer du napalm, et en autre, comment fabriquer des bombes tres facilement." puisqu'à peu de choses près, il est possible de faire sauter un immeuble avec du savon. C'est un peu ma manière à moi d'essayer de faire tomber ses ordures du gouvernement et de semer un peu la pagaille.
La nuit quand à elle, je préparais mon petit business, de quoi gagner ma vie et éloigner ses répétitions chiffrées incontrôlables qui me harcelaient durant la journée. Je ne dormais pas. tic tac..
Depuis mon arrivée en amerique, je m'en sortais donc plutot pas mal, le seul soucis, était cette impression désagréable et invivable d'etre sans arret suivi et observé. Une horloge qui me poursuit. Des lignes qui pistent mon chemin. Et des chiffres qui m'évaluent.




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Précisions supplémentaires :
-Certains se sont peut-etre posés la question de la nationalité d'Aleksandr Tchavelski. Il est né à Kiev, a passé son enfance à Odessa, et se revendique russe. Ce n'est pas une erreur, il est important de souligner les changements en Asie du Nord/Europe. La Russie est devenu en 2013 la Nouvelle Russie (plus communément appelée NR pour des raisons pratiques, regroupant la Fédération de Russie, l'Ukraine et la Biélorussie suite à une série d'attentats simultanés dans les villes de Kiev, Novosibirsk et Moscou. Ces faits n'arrangeant rien à la crise économique à cette époque, les trois pays ont décidé de s'allier et s'entraider. Vladimir Poutine, élu en 2012, se suicidera en 2014 "sa cravate au cou, il était suspendu dans le vide de la salle à manger, je n'ai rien pu faire pour le sauver" affirma son ex-conjointe Lioudmila Alexandrovna Poutina, désemparée . La Nouvelle Russie, elle, reviendra à un système communiste en 2035).

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